prière et travail

La devise bénédictine « ORA ET LABORA » (Prie et travaille) veut exprimer que, dans notre vie de moniale, des temps sont consacrés explicitement à la prière et d’autres, au « travail des mains »  selon l’expression propre à Saint Benoît dans sa Règle.

Mais si le terme « moine », « monos »  signifie « UN », c’est-à-dire un être unifié que nous aspirons tous à devenir, cela veut dire aussi que notre vie concrète tend progressivement à cette unification dans un seul travail, ou dans une seule prière, mais sous des modalités diverses. Alors, l’adage « ORA ET LABORA » est à comprendre  dans le sens où le « ET »  exprime plutôt une reliance, un trait d’union et non une juxtaposition temporelle de deux activités.

D’ailleurs, il est intéressant de noter que Saint Benoît, dans sa Règle, emploi le mot « OPUS» (œuvre, travail) tantôt pour désigner le temps de la prière au chœur : « l’OPUS DEI », tantôt le travail proprement dit dans le monastère.

De même le terme  latin « OFFICIUM » désigne tantôt la prière (l’Office divin), tantôt les différents services et offices des frères.

Nous utilisons  aussi ce mot « OPUS », « ouvrage », « œuvre » pour désigner nos temps de prière au chœur. Alors, nous pouvons dire que nous travaillons presque toute la journée !!

Jésus dit lui-même qu’il est toujours à l’œuvre : « Mon Père est à l’œuvre et moi aussi je suis à l’œuvre » Jn 5,17 ; « l’œuvre de Dieu, c’est de croire en celui qu’il a envoyé » Jn 6,29

Oui, notre prière à l’église est bien un travail,  un « bel ouvrage », un labeur. La maîtresse de chœur et les chantres en particulier, mais aussi chacune d’entre nous le savons bien. L’office divin, le chant, est vraiment un travail de tout notre être, de notre corps de la tête aux pieds ; de notre intelligence et de toute notre âme. Saint Benoît  demande que notre esprit et notre cœur concordent avec notre voix.

Si notre prière est bien un travail, nous devons tendre aussi à ce que notre travail concret soit tout imprégné de prière. Pour certains travaux répétitifs, manuels, il est facile de prier dans le silence du cœur, une invocation (« Dieu viens à mon aide» par ex), la prière de Jésus (« Seigneur Jésus, Fils de Dieu, prends pitié de moi, pécheur ») ou toute autre invocation dont chacune a le secret. Cette prière du cœur peut être aussi imprégnée de  toutes les intentions qui nous sont confiées.

Pour certaines tâches qui demandent davantage de concentration (comptabilité, gestion, déclarations administratives de toutes sortes), il ne peut s’agir bien sûr d’une prière consciente et explicite. Puisque ces travaux nous sont confiés par notre Prieure, notre prière est d’accomplir alors aussi bien que possible ce travail dans cette  disposition intérieure de vouloir répondre à la volonté du Seigneur. Et de temps en temps, des « clins Dieu » se mêlent aux chiffres, voire des « SOS ». Ces travaux nous permettent  de garder les pieds sur terre, d’être solidaires de notre société dans toute sa complexité. Nous partageons vraiment les joies et les soucis de nos frères. Ces travaux faits de bon cœur et « sans murmurer » comme le demande Saint Benoit nous associent à l’œuvre du Christ qui sauve le monde.

©Thomas Louapre
©Thomas Louapre